par racism-search | Mar 31, 2024 | Articles, Belgique, Colonisation, Débat, Racisme
Les zoos humains : la conquête de “l’exotisme”
Les prémices des zoos humains
Bien que les zoos humains soient documentés à partir du 19e siècle, leurs origines remontent bien avant cette période. Elles peuvent être retracées :
→ Dès le 14ème siècle, avec les exhibitions de certaines personnes d’origine extra-européennes devant des publics restreints. Un exemple est l’exhibition d’autochtones Arawaks ramenées des “Amériques” par Christophe Colomb devant la Cour de la Reine Isabelle de Castille [1].
→ Ainsi qu’au 17ème siècle, lors de l’apparition des jardins zoologiques [2]. Ces jardins zoologiques étaient envisagés comme des extensions de musées, ayant pour mission de recenser et cataloguer la diversité du vivant via les voyages des explorateurs [2].
À partir du 19ème siècle, il ne s’agit plus d’exposer uniquement des animaux et une nature dite “exotique” mais aussi des êtres humains. On reconnaît notamment le grand entrepreneur allemand de cirque, Carl Hagenbeck, pour avoir popularisé l’idée de présenter des personnes d’autres cultures dans des zoos afin de les rendre accessibles au grand public comme les animaux [3]. Ces zoos humains se distinguent des exhibitions réalisées jusqu’ici car le but est de mêler la pseudo-science, au spectaculaire pour exposer des personnes décrites comme racialement inférieures [4]*.

A group of Igorot displayed at a human zoo during the St. Louis World’s Fair[1][2]
Les zoos humains: outils de propagande coloniale
A cette époque, en Europe, les grandes puissances renforcent leur plan colonial et l’esclavagisme d’autres peuples en les mettant en avant lors d’événements tels que l’ exposition d’Amsterdam en 1883 ou l’Exposition universelle de Paris en 1878 [5]. La Belgique n’y échappe pas et le roi Léopold II utilise l’Exposition internationale pour sa propagande coloniale et sa recherche d’investisseurs* au Congo. Celle-ci se déroule à Tervuren (Bruxelles) du 10 mai au 8 novembre 1897 [6]. C’est à cette occasion que le roi Léopold II ordonne la construction du « Palais des Colonies » à Tervuren, actuellement connu sous le nom de Palais de l’Afrique, sur le site de l’ancien pavillon du prince d’Orange, qui avait été détruit par un incendie en 1879 [6].

Poster for the colonial section of the 1897 International Exposition
Des villages congolais avaient été reconstruits dans le parc de la Warande à Tervuren dans le but d’attirer les visiteurs. Deux des 269 Congolais·e·x·s prévu·e·x·s pour y vivre ont trouvé la mort pendant le voyage [7]. Sept autres Congolais·e·x·s – Ekia, Gemba, Kitukwa, Mpeia, Zao, Samba et Mibange – n’ont pas survécu et ont été enterré·e·x·s à Tervuren [7]. Après leur décès, il leur est refusé d’être enterré·e·x·s dans le cimetière local. Ce n’est qu’en 1953 que leurs restes sont déplacés dans des sépultures situées dans la cour de l’Église catholique Saint-Jean l’Évangéliste de Tervuren [6]. Chaque année, une journée de commémoration est organisée en leur honneur par des collectifs tels que le collectif Mémoire Coloniale. Notons que ces expositions ne visaient pas exclusivement les personnes africaines mais aussi les autres peuples considérés “de race inférieure”. Par exemple, 14 autochtones d’Araucanie (Chili) sont aussi exposés dans le Parc Léopold à Bruxelles en octobre 1883 [8]. Bien que ces expositions n’obtiennent pas le consentement de toute la population belge, un “village congolais” est également construit pour l’Expo 58 à Bruxelles où des étudiant·e·x·s congolais·e·x·s sont mis·e·x·s en jeu. Alors même que l’indépendance congolaise gronde, cette surface d’exposition réservée au Congo cherche à justifier la présence de la Belgique au Congo [8].
* Nous vous invitons à lire notre article sur la définition du racisme et sur le non existence du racisme anti-blanc pour comprendre le hiérachisation des races.
* Pour rappel, à cette époque les colonies n’appartiennent pas à l’État belge mais au Roi Léopold II.
L’après zoos humains, la continuité de la déshumanisation
Malgré la fermeture des zoos humains dans le cadre des “expositions universelles”, la déshumanisation des personnes racisées continue.. Non sous la forme frontale qu’on a pu voir des années auparavant, mais de manière plus insidieuse.
La tribu des Jarawa – Inde
Dans l’archipel d’Andaman- et-Nicobar en Inde, la tribu isolée des Jarawa sert d’attraction touristique. Les touristes traversent leur terre en se croyant dans un safari. Par ces pratiques et la sédentarisation forcée depuis les années 1990, cette tribu est menacée d’extinction et avec elle, tous leurs savoirs ancestraux.

Le parc “Bamboula” – France
Le parc “Bamboula” était le plus célèbre zoo humain moderne qui fut fermé en 1994 seulement [9]. La marque St Michel qui commercialisait les biscuits “Bamboula” a été le sponsor d’un “parc animalier” près de Nantes qui fut en réalité un zoo humain moderne. Entre girafes et autres lions, il existait un village ivoirien à la demande du directeur, Dany Laurent [9]. Des artisan·e·x·s, danseur·euse·x·s, chanteur·euse·x·s y furent installé·e·x·s dans des conditions inhumaines et dégradantes tout en étant soigné·e·x·s par des vétérinaires [9].

Le village de Kirikou dans le chemin de brousse, Planète Sauvage (Loire-Atlantique, France)
Ces personnes prétendument envoyé·e·x·s par l’Office ivoirien du tourisme pour promouvoir la culture ivoirienne se sont retrouvé·e·x·s enfermé·e·x·s comme des animaux, Leurs passeports ont été confisqués, et la protection des travailleur·euse·x·s prévue par le droit français n’était pas en application. Les enfants présents étaient scolarisé·e·x·s seulement quelques heures. Les danseuses ont quant à elles subi des agressions sexuelles de la part de membres de l’organisation [9] . Sans oublier qu’elles étaient toutes mineures, entre 13 et 15 ans, et devaient danser de 12h30 à 18h30; ;le tout seins nus en extérieur, seulement vêtu d’un pagne et d’un bambou sans chaussures [9]. La section nantaise du Syndicat national des artistes musiciens (SNAM), auprès d’autres organisations, a elle aussi dénoncé les conditions de travail de ces artistes. La SNAM a comparé ce village à une nouvelle exposition coloniale, mêlant humains et animaux.
Suite à la mobilisation de plusieurs associations, le collectif « Non à la réserve humaine » a vu le jour et a saisi l’affaire devant la justice. Le 1er juillet 1997, le tribunal de Nantes a condamné le parc pour violation du droit du travail et droits fondamentaux [9]. Le village ivoirien disparaît en septembre 1994, le parc est renommé « Planète Sauvage ». En 2013, l’ancienne zone du village devient un espace animalier pour Madagascar et les lémuriens. En 2014, le village Kirikou est créé en collaboration avec Michel Ocelot [9].
Les pygmées camerounais – Belgique

Nature preserve owner Louis Raets shows off one of his displays as part of a Pygmy village exhibition at the Oasis Nature Park in Yvoir, Belgium. Although the show has led to protests, Raets insists the showcase is to inform people of the Pygmy way of life and in no way attempts to shame anybody.
En 2002, à Yvoir, l’ASBL “Oasis Nature” est à l’origine d’une exposition sur la vie des Pygmée·x·s camerounais [11]. Durant cette exposition, des Pygmées sont venu·e·x·s du Cameroun pour reconstituer un village Bakas et se mettre en scène en chantant et dansant. Cette exposition a soulevé de nombreuses questions et réactions, notamment du Mouvement des Nouveaux Migrants (MNM) qui souligne la déshumanisation de ce type d’événement. Cependant, l’ASBL s’est toujours défendu de réaliser ce projet dans le but de sensibiliser les Belges aux problématiques que rencontre ce peuple. Ces pratiques coloniales contemporaines ont évidemment eu des conséquences sur la perception qu’ont les personnes blanches des personnes racisées
Conclusion : Des zoos humains aujourd’hui ? Leurs formes et ses conséquences
La télévision a elle aussi participé à la création de zoos humains modernes. Les émissions de télé “découverte” telles que “Predators, Tribes, and me” (BBC Earth), continuent d’imposer une distinction entre l’Occident et le reste du monde comme étant “moins évolué”, ou “bizarre”. Pour les chercheurs Nicolas Bancel et Olivier Razac, puisque les téléréalités mettent en avant des groupes de personnes issues de milieux ou de régions “stigmatisés” en jouant sur ces stéréotype; elles en font des “acteur·ice·x·s” de divertissement, rejoue le schéma du zoo humain [12].
Le voyage peut lui aussi participer à une modernisation du zoo humain [13], lorsqu’on souhaite s’immerger dans une culture et découvrir un pays. Si l’on prend le concept des Clubs Med par exemple, ils ont pendant longtemps invisibilisé les travailleur·euse·x·s locales ou réalisé des mises en scène de leur culture de manière très stéréotypée. La découverte d’une autre culture n’est présente que pour divertir les touristes et participe rarement à l’économie locale.
Que ce soit les zoos humains de l’époque ou les zoos humains d’aujourd’hui, le constat reste le même : ces outils participent à l’exotisation et l’infériorisation de l’Autre qui est généralement une personne racisée. Cela participe grandement à maintenir des stéréotypes qui ont vu le jour durant l’époque “des explorations” et avec la propagande coloniale jusqu’à aujourd’hui. Par ces stéréotypes* et selon son origine ethinique, l’Autre est vu comme sauvage, bête, voleur·euse, sale, coincé·e, rigide etc… mais on l’applaudit pour ses danses et ses plats exotiques. Il est donc nécessaire de faire un travail de déconstruction de nos représentations pour replacer les personnes blanches et personnes racisées sur le même pied d’égalité.
*Voir nos deux articles sur les stéréotypes pour avoir des exemples et comprendre le poids de ces stéréotypes
Sources
[1] P. Blanchard, “ De la a Vénus hottentote aux formes abouties de l’exhibition ethnographique et coloniale Les étapes d’un long processus (1810-1940)”, in La venus Hottentote , 2013, p. 38.
[2] N. Bancel, « Introduction : Zoos humains : entre mythe et réalité », Nicolas Bancel éd., Zoos humains. Au temps des exhibitions humaines, 2004, La Découverte, p.7.
[3] P. Blanchard, N.Bancel et al, “ Zoo humains et exhibitions coloniales : 150 ans d’inventions de lAutre, 2011, La découverte, p.16.
[4] N. Bancel, « Introduction : Zoos humains : entre mythe et réalité », Nicolas Bancel éd., Zoos humains. Au temps des exhibitions humaines, 2004, La Découverte, p.8.
[5] P. Blanchard, “ De la a Vénus hottentote aux formes abouties de l’exhibition ethnographique et coloniale Les étapes d’un long processus (1810-1940)”, in La venus Hottentote , 2013, p. 52.
[6] AfricanMuseum, “ Le zoo humain de Tervuren (1897)”, disponible sur www.africanmuseum.be, consulté le 10 mars 2024.
[7] Presses Nord-Sud, “ Africa Tervuren et les zoos humains: une expo”, disponible sur ww.arpns.be, publié le 29 septembre 2021.
[8] Culturemedia, “ «Zoo humain au temps des exhibitions coloniales à l’Africa Museum”, disponible sur www.culturemedia.be, publié le 16 février 2022.
[9] Julien Coquelle-Roëhm et Nina Soyez “ Retour au «village de Bamboula»: en 1994, un «zoo humain» à prétention touristique”, Médiapart, publié le 9/05/2021,
[10] France Inter, “Le village Bamboula” dernier zoo humain en France, émission radio publié le 18/01/2022
[11] La Libre, “Des pygmés exposés aux regards”, disponible sur www.lalibre.be, Publié le 25-07-2002
[12] Les Zoos humains aujourd’hui, Pascal Blanchard, disponible www.cairn.info, Publié le 01/04/2010
[13] Compte instagram @decolonial.voyage, consulté le 11 mars 2023
par racism-search | Mar 31, 2024 | Articles, Interviews, Racisme, White privilege
par Oceane Toukam | Jan 20, 2024 | Citations, History, Personnages, Racisme
« Racism is still with us. But it is up to us to prepare our children for what they have to meet, and, hopefully, we shall overcome. »
traduction: Le racisme est toujours présent. Mais c’est à nous de préparer nos enfants à ce qu’ils auront à rencontrer et, espérons-le, nous le surmonterons

GG Vintages images, 1955, Rosa Parks in Montgomery, Alabama in 1955 by the bus boycott she began.
Née le 4 février 1913 à Tuskegee (Alabama) aux Etats-Unis, Rosa Parks est une figure emblématique du combat pour les droits civiques des Noirs Américains. Elle est mondialement connue pour avoir refusé de céder sa place à une personne blanche dans un bus alors que l’Amérique était en pleine ségrégation raciale.
Jusqu’à ses onze ans, elle reçoit une éducation à la maison par sa mère avant de faire quelques années à l’école primaire. Elle commence ses études secondaires à l’Alabama State teachers college of Negroes mais finit par interrompre son parcours scolaire pour s’occuper de sa grand-mère ainsi que de sa mère gravement malades.
Sa flamme d’activiste commence avec son mariage à Raymond Parks, coiffeur militant pour la cause des droits civiques et membre de la section de la National association for the Advancement of Colored people ( NAACP), en 1932. Ce dernier l’encourage à finir ses études secondaires. A l’époque, il s’agit d’un accomplissement rare pour les Noirs Américains car seulement 7% d’entre eux obtiennent un diplôme secondaire.
En décembre 1943, elle rejoint le mouvement des droits civiques en adhérant la à la NAACP en tant que secrétaire jusqu’en 1957.
En 1955, Rosa entre dans un bus. Selon les lois de l’époque, les Noirs étaient tenus de s’asseoir à l’arrière des bus. Un homme blanc entre dans le bus et le chauffeur lui impose de lui laisser laisser la place, ce qu’elle refuse fermement. Cet incident résulte en son arrestation et emprisonnement.
Le lendemain, une campagne de boycott de la compagnie de bus avec, à sa tête, Martin Luther King commence et se maintient pendant plus d’un an.
Le 13 novembre 1956, la Cour suprême déclare illégales les lois ségrégationnistes de Montgomery, ce qui met fin au boycott.
Rosa Parks continue de se battre pour les droits des Noirs Américains tout le restant de sa vie et reçoit de nombreuses récompenses dont la médaille présidentielle de la liberté ( plus haute distinction remise par l’exécutif américain). Elle s’éteint le 24 octobre 2005 laissant derrière elle plusieurs fondations en son nom
par Cyril Martin | Jan 16, 2024 | Articles, Racisme, Thèmes
Qu’est-ce que le racisme ?
Notre organisation orientée vers la lutte contre le racisme, il nous paraît ainsi évident de commencer par la question la plus fondamentale : qu’est-ce que le racisme ?
Afin de comprendre au mieux ce phénomène, nous devons commencer par distinguer la notion de discrimination du racisme. Le premier terme se rapporte à l’action d’isoler, de distinguer et de traiter différemment certains individus, ou même un groupe entier par rapport aux autres. [2].
La discrimination peut s’appuyer sur différents critères (âge, sexe, nationalité, race, etc). Il s’agit d’un concept large qui peut couvrir des actes racistes mais qui ne permet pas, à elle seule, de comprendre l’étendue du racisme. C’est pourquoi il est primordial de bien comprendre que ces deux notions présentent des similitudes mais ne sont pas identiques.
Le racisme, quant à lui, est fondé sur un ensemble de croyances ou de doctrines systématisées selon lesquelles il existe différentes races ainsi qu’un classement hiérarchique entre elles.
Le racisme ne se présente pas sous une seule et même forme. En effet, nous retrouvons généralement une distinction en fonction de l’adjectif qu’on lui accole : « scientifique», « institutionnel », « systémique », ou encore “ordinaire”
Le racisme scientifique

Le racisme communément appelé “scientifique” émerge avec l’objectif de classer les êtres humains en fonction de leurs caractéristiques phénotypiques telles que la couleur de peau, la taille du crâne, les traits du visage, etc [3].
Le racisme institutionnel et le racisme systémique
Bien que certains confondent souvent ces derniers, le racisme institutionnel se différencie du racisme systémique. Le racisme institutionnel est intégré dans le système politique, économique ,légal , ainsi que dans les relations professionnelles et académiques ( on le retrouve dans des systèmes comme l’apartheid ou encore la ségrégation) [4].
Le racisme systémique quant à lui vise les conduites racistes adoptées par ces mêmes institutions, en dehors d’un cadre légal ou procédural prédéfini. Il s’agit des inégalités de chances, des discriminations académiques, des discriminations face à la justice, de l’évaluation négative d’un groupe de personnes en raison de sa couleur de peau, etc. [5].
Le racisme ordinaire est direct, se caractérise par un discours haineux, du quotidien ou encore une « exagération des différences entre les cultures ou les systèmes de valeur ». Un exemple actuel est le cas de blackface. mais on le retrouve aussi dans l’imitation d’accent et tout autres stéréotypes.
Conclusion
En conclusion, en plus de la différence entre la notion de racisme et de discrimination, il existe plusieurs types de racismes. Il n’existe pas une échelle de gravité entre ces derniers. Chaque catégorie est la conséquence d’une autre. Chacune d’entre elles fait du mal à la personne qui la subit. C’est pour ça qu’avec Racism Search, nous avons comme but de sensibiliser le plus possible les gens sur cette thématique qui, au 21ème siècle, ne devrait plus exister.
Sources
[1] Larousse, disponible sur https://www.larousse.fr, consulté le 21 novembre 2020.
[2] Ahmed Lemligui, « Histoire d’un racisme au long cours. Quelques pistes pour un travailleur social », Le sociologue, 2011/1 (n°34), disponible sur www.cairn.info.be, p. 14.
[3] Ibid.
[4] Ahmed Lemligui, op.cit., p. 16 ; Florian Gulli, “Racisme institutionnel”, disponible https://lavamedia.be, 1er juillet 2020
[5] Fabrice Dhume, “Du racisme institutionnel à la discrimination systémique ? Reformuler l’approche critique”, Migrations Société 2016/1 (N° 163), disponible sur www.cairn.info.be, pp. 33-46.
par racism-search | Jan 3, 2024 | Articles, Discrimination, Général, Racisme
La haine raciale sur les Réseaux Sociaux

Auparavant, les réseaux sociaux n’existaient pas et le racisme n’était visible que dans le “monde réel”, dans la réalité sensible . Or, désormais, en un clic nous disposons de l’information que nous cherchions, nous pouvons communiquer avec des personnes à l’autre bout du monde. Mais loin de n’apporter que des aspects positifs, les réseaux sociaux engendrent des aspects négatifs.
Le déferlement de la haine raciale est l’un d’eux.
En effet, à cause de la popularité des réseaux sociaux, de leur diversité mais aussi de leurs réglementations floues, les discours de haine sont nombreux et se diffusent rapidement sur les différentes plateformes [1]. Alors que des personnes n’oseraient jamais tenir certains propos de visui, Internet devient un défouloir où les langues se délient, de l’#antihomosexuel à #SiMaFilleRamèneUnNoir sous couvert de la “liberté d’expression”[2].
Responsabilité et influence des différentes plateformes
Bien que cela ne soit peut-être pas notre premier réflexe lorsqu’on aborde ce sujet, le racisme sur les réseaux sociaux se manifeste souvent en premier lieu dans la structure et le fonctionnement de la plateforme. En effet, comme le relèvent plusieurs auteurs tels que Marc Faddoul [3] et Sendhil Mullainathan [4], les algorithmes ne sont neutres qu’en apparence.
Ainsi, sur Tik Tok, les recommandations de comptes faites aux utilisateurs se basent sur les caractéristiques physiques des photos de profil des comptes que les utilisateurs suivent déjà. Ce phénomène se nomme “filtrage collaboratif” et peut être problématique car il peut reproduire les préjugés des gens.
“Si la majorité des créateurs populaires sur TikTok sont blancs, par exemple, cela peut empêcher que les créateurs de couleur ayant moins de followers soient vus et recommandés aussi souvent sur la plateforme”[3].
Cela implique également que ces créateurs racisés soient moins rémunérés pour le contenu qu’ils produisent et ne puissent donc pas vivre du fruit de leur travail, et cela non pas à cause de la qualité de leur contenu mais bien à cause des biais des algorithmes.
D’après une enquête du Wall Street Journal [5], les algorithmes employés par Tik Tok recommandent également plus souvent des créateurs correspondant à certains critères de beauté. Si cela est déjà très problématique en soi, les critères sur lesquels se basent ces algorithmes sont des critères de beauté occidentaux, ce qui exclut une fois encore les personnes racisées des recommandations de Tik Tok.
Sendhil Mullainathan, dans un article au New York Times, incite les plateformes à remédier au problème des préjugés algorithmiques, de la manière suivante : en “s’assurer que toutes les données nécessaires à l’algorithme, y compris les données utilisées pour le tester et le créer, sont soigneusement stockées ” [4].
Des contenus à connotation raciste …
En second lieu, le racisme est également présent via le contenu partagé sur les réseaux.
Le cas Tiktok
Comme mentionné dans le point précédent, la popularité est liée à la question algorithmique. D’ailleurs, un #BlackTikTokStrike a débarqué sur les réseaux pour dénoncer l’appropriation culturelle* des danses issues de la communauté noire. Beaucoup de tiktokeurs et influenceurs blancs reprennent – consciemment ou non – des danses qui deviennent virales, sous leur nom.
Ce qui est décrié est le peu de popularité de ces danses lorsqu’elles sont exécutées par les auteurs noirs qui, par conséquent, ne perçoivent pas les retombées de leur création .. [7]
La plateforme réagit :
“Nous nous soucions profondément de l’expérience des créateurs noirs sur notre plateforme et nous continuons à travailler chaque jour pour créer un environnement de soutien pour notre communauté, tout en instillant une culture où honorer et créditer les créateurs pour leurs contributions créatives est la norme.” [7]
L’ISD (Institute for Strategic Dialogue) s’exprime à travers d’un rapport sorti en août 2021 “TikTok fonctionne comme une nouvelle arène pour les idéologies haineuses incitant à la violence.” [6] Des vidéos qui rient et nient l’Holocauste et l’instrumentalisation d’une chanson juive (Hava Nagila) sont des exemples percutants dénoncés par l’ISD [6]. Ils sont représentatifs d’une transmission de haine raciale.
Sur Instagram, on peut rappeler le challenge lancé par la star de Télé-réalité Jazz qui s’est peint la moitié du visage en noir. Consciente ou non de son acte, elle s’est vite fait lourdement critiquée par les internautes [8]. Cette pratique nommée “BlackFace” est fortement empreinte de connotations racistes**. Avec les médias virulents, ce genre d’accident peut vite être repris par des personnes qui ont peu de recul critique sur lesréseaux sociaux, ou qui sont juste inconscientes de la problématique.
Les commentaires des utilisateurs
Nous en parlions déjà dans notre article sur le racisme en milieu sportif lorsque nous soulignions les commentaires haineux qu’on subit les joueurs Marcus Rashford, Jadon Sancho et Bukayo Saka après la défaite de l’Angleterre en finale de l’Euro. Les internautes jouent aussi un grand rôle dans la propagation de la haine raciale sur les réseaux sociaux.
Nous avons déjà tous vu des commentaires racistes sous des articles parlant d’immigration par exemple ou des incitations à la haine raciale sur des réseaux tels que Twitter ou Instagram. Ces commentaires vont même parfois jusqu’à des appels aux meurtres, et bien que l’option “signaler ce commentaire” ou cette publication existe, il est à noter que les géants d’Internet sont généralement peu réactifs [9]. Ces outils de signalement ont été utilisés sur trois grandes plateformes ( Instagram, facebook et youtube) par L’UEJF, SOS Racisme et SOS Homophobie et uniquement 77 contenus ont été supprimés sur les 548 signalés [10].
Equilibre entre la liberté d’expression et le devoir d’action
Si une majorité d’internautes est consciente que de tels propos ont des impacts au-delà des réseaux sociaux, l’absence de conséquences sur la sphère digitale est une raison qui pousse à exprimer ouvertement une intolérance et/ou une haine envers certains groupes de personnes. Ce qu’il reste intéressant
à noter est la justification souvent apportée à ces propos : la liberté d’expression. Il s’agit du droit d’exprimer son opinion ou ses idées sans qu’une réprobation ne puisse être prise à l’égard de son auteur et ce, même si ces idées sont inconvenantes, déplacées, et outrageuses [11].
Toutefois, dans ce grand nombre de personnes qui invoquent la liberté d’expression pour vociférer des propos racistes et discriminatoires, peu importe la limite imposée à cette liberté, lorsque ces propos révèlent une incitation à la haine, à la discrimination, à la violence ou à la ségrégation à l’égard d’autrui sur un lieu public* [11].
S’il est possible d’obtenir une condamnation pour ce type de propos en justice, il faut se demander s’il n’y a pas un moyen de prévenir ce type de comportement sur les réseaux sociaux.
*Notons qu’un lieu public désigne également tout message, vidéo ou photo sur internet qui est communiqué ou accessible à une ou plusieurs personnes.
Les plateformes sont les vecteurs principaux de la propagation du racisme. Elles ont une responsabilité à l’égard de la société d’introduire des règles de conduite et des sanctions suffisantes pour dissuader ce genre de commentaires. Cela est notamment appuyé par l’Union européenne qui a imposé une condamnation financière à tout réseau social qui ne respectait pas les réglementations luttant contre le racisme [12].
Au vu de ces règles et notamment de l’intervention de la justice, nous pouvons constater que certaines actions ont été entreprises par les plateformes digitales afin de remédier à ce problème. Ainsi, par exemple, il a été révélé par l’Unia que les plateformes ont employé du personnel chargé de nettoyer les commentaires haineux, dangereux et discriminatoires [12].
Toutefois, l’afflux de haine sur les réseaux ne fait qu’augmenter et certains doutent de la réelle effectivité du plan d’action de ces plateformes. A titre illustratif, le réseau Twitter a récemment été assigné en justice par quatre associations luttant contre des discriminations pour son manque de réelles actions [13]. Ceci n’est qu’un exemple de l’écart entre le devoir d’action des entreprises et la mise en œuvre d’une véritable restriction. Mais expliqué ci-dessus, le même problème est toujours observé sur les autres plateformes populaires sur lesquelles il reste possible de véhiculer des discours racistes sans réelle conséquence.
* N’hésite pas à aller lire l’article sur l’appropriation culturelle pour en savoir d’avantage (12 avril 2021)
** Notre position sur le phénomène “BlackFace” est expliquée dans l’article “Pourquoi le père fouettard est-il problématique?” (6 décembre 2020)
SOURCES :
[1] A. de Latour, N. Perger, R. Salaj, C. Tocchi, P. Viejo Otero, C. Del Felice et M. Ettema, R. Gomes, “Alternatives: Les contre-récits pour combattre le discours de haine ”, Strasbourg, France: Conseil de l'Europe, 2017, p. 45.
[2] G. Peronne, “Discrimination et réseaux sociaux”, disponible sur www.pnrs.ensosp.fr, Décembre 2014.
[3] Forbes, “Tik Tok : la plateforme est-elle raciste?”, disponible sur www.forbes.fr, publié le 15 avril 2020
[4] The New York Times, “Biased algorithms are easier to fix than biased people”, disponible sur www.nytimes.com, publié le 06 décembre 2019.
[5]The Wall Street Journal, “Inside Tik Tok’s algorithm: a WSJ video investigation”, disponible sur www.wsj.com, publié le 21 juillet 2021.
[6] Protestinter, A. Molina, “Tiktok gangrené de contenus racistes, antisémites et islamophobes” disponible www.reformes.ch, publié le 31 août 2021
[7] Courrier International, “ #BlackTikTokStrike, le mouvement de révolte des danseurs noirs”, disponible sur www.courrierinternational.co , publié le20 juillet 2021
[8] G. Dauge, “PHOTO Jazz (JLC Family) accusée de “blackface”, elle supprime son dernier cliché qui fait polémique”, disponible sur www.voici.fr, publié le 1 juin 2021
[9] C. Belaïch , “ Peut-on lutter contre l’incitation à la haine sur les réseaux ”, disponible sur www.liberation.fr, publié le 13 mai 2016.
[10] SOS Racisme, “ SOS Racisme, SOS Homophobie et l’UEJF étrillent Twitter, YouTube et Facebook”, disponible sur www.sos-racisme.org, consulté le 16 octobre 2021.
[11] UNIA, “Les limites à la liberté d’expression”, disponible sur https://www.unia.be, consulté le 15 octobre 2021.
[12] K. Azzouz, “Racisme et réseaux sociaux : l'impunité s'est pris les pieds dans la toile”, disponible sur https://www.rtbf.be/, publié le 19 février 2020.
[13] Martin Untersinger, “ Twitter assigné en justice pour son « inaction massive » face aux messages haineux”, disponible sur www.lemonde.fr, publié le 12 mai 2020.
par racism-search | Jan 3, 2024 | Articles, Débat, Racisme, White privilege
Le White Privilege
“Je suis née blanche comme d’autres sont nés hommes. […] Le privilège, c’est avoir le choix d’y penser, ou pas. Je ne peux pas oublier que je suis une femme. Mais je peux oublier que je suis blanche. Ça, c’est être blanche. Y penser, ou ne pas y penser, selon l’humeur. »
1. Définition du concept
S’agissant d’un concept faisant beaucoup grincer les dents et étant vivement débattu dans l’espace public, nous jugeons utile d’aborder la problématique du “ white privilege ».
Tout d’abord, il est important d’avoir en tête la définition du mot privilège. Selon le dictionnaire Le Robert, le privilège est un “ droit, avantage particulier accordé à un individu ou à une collectivité, en dehors de la loi commune” [1] .
Ainsi, tout être humain, de manière générale, est soumis à des privilèges qui peuvent être directement liés à son apparence, à son appartenance ethnique ou encore à sa classe sociale.
Quand on parle de privilège blanc, de blanchité, on ne vise donc pas à accuser les personnes blanches d’être blanche, mais plutôt à souligner les privilèges dont elles diposent dans un monde où le racisme systèmique* prévaut [2].
En effet, “ la blanchité permet de tirer avantage involontaire, voire inconsciemment , du fait que d’autres personnes soient racisées donc discriminées” [3].
Enfin, nous pouvons reprendre la définition du “privilège blanc” utilisée par la ligue des droits et liberté qui nous semble assez précise et consise; c’est un ensemble d’ « avantages invisibles mais systématiques dont bénéficient les personnes dites « Blanches » uniquement parce qu’elles sont « Blanches » [3].
* Voir article “ qu’est-ce que le racisme? ” pour les différents types de racisme.
2. Apparition du terme en Amérique
Le terme “white privilege”, traduit en français comme privilège blanc, est apparu aux États-Unis à partir des années 60, par les activistes et universitaires [4]. C’est pourtant Peggy McIntosh, féministe, activiste blanche et auteure en 1989 de l’article “ White Privilege: Unpacking the Invisible Knapsack” *, qui théorise le concept. Elle énumère des exemples concrets de ce que représente le privilège blanc. [4]

Katie Koch, « Using privilege helpfully' », The Harvard Gazette, photographiée par Stephanie Mitchell, publié le 19 décembre 2012, disponible sur https://news.harvard.edu/gazette/story/2012/12/using-privilege-helpfully/
Mais qui est-elle? Née en 1934, Peggy McIntosh grandit dans une famille aristocratique dans le New Jersey. Elle étudie à Radcliffe et obtient un doctorat d’anglais à Harvard [7]. Son ouvrage reste un appui théorique couramment utilisé en sociologie [8].
Dans son article, on lui reproche pourtant de mélanger dans certains points de sa liste le “privilège blanc” et le privilège de sa classe sociale. [4] Cette critique permet de concevoir la connexion entre ces deux luttes et repenser au concept d’ ”intersectionnalité”, popularisé par la sociologue Patricia Hill Collins, féministe noire [8].
3. Une période tumultueuse
L’émergence du concept et sa revendication apparaît dans une période tumultueuse et représente une nécessité. Les “sixties” représentent une période de changements et de luttes pour les Afro-descendants aux Etats-Unis.
En effet, durant cette décennie, les luttes pour l’égalité entre les “races” ont permis le début d’une “déségrégation” de la vie quotidienne des Noirs américains avec la loi sur les droits civiques de 1964 adoptée par le président Lyndon Johnson qui abolit certaines discriminations liées à la race. [5] Néanmoins, le chemin est long et périlleux; les Noirs continuent à subir des discriminations à l’embauche, à l’accès à l’enseignement, dans les lieux publics *, au droit de vote, etc. [5]
Plusieurs mouvements de luttes pour l’égalité des races émergent. Le mouvement afro-américain des droits civiques (entre 1954-1968) en est un et manifeste contre l’inégalité de traitement entre les ”races”. Martin Luther King -pasteur américain- en est l’emblème et est assassiné en 1968. [6] Cet exemple, parmi d’autre, permet de rendre compte d’une prise de conscience et d’une pensée générale qui a amené à conceptualiser “le privilège blanc”.
Depuis les années 2000, ce terme s’est vulgarisé et s’est installé dans l’espace public [4] Précurseur d’une nouvelle façon d’appréhender le racisme, le concept amène de nombreux débats.
3. Controverse et débat dans l’espace public
La notion de privilège blanc a profondément divisée. Ce terme utilisé pour illustrer l’expérience des personnes racisées et les effets du racisme a été jugé comme une attaque, une arme à l’encontre des personnes blanches.
Tout d’abord, ce terme apparaît, pour certains, comme un outil “contre-productif” en ce qu’il renforce la distinction entre personnes racisées et non racisées. [9] C’est ainsi que nous avons pu apercevoir des réactions vives de haine ou d’incompréhension, criant au “reverse racism” ou à la victimisation des personnes racisées.
Or, le sociologue Eric Fassin, co-auteur de “De la question sociale à la question raciale”, rappelle qu’il ne s’agit pas d’une notion qui entérine les inégalités raciales mais au contraire il s’agit d’un concept qui contribue à mettre en lumière le racisme. Ainsi, selon ce dernier, “il est important de rappeler que les racisés ne sont pas définis par leur couleur de peau, mais par leur expérience similaire du racisme. Quand on est un parent racisé, on ne s’inquiète pas de la même manière quand nos ses enfants rentrent un peu tard le soir. Ça ne veut pas toujours dire qu’on a raison de craindre le racisme, mais la charge réside dans le fait d’avoir à se poser la question. En tant que blanc, si on me refuse un appartement, je ne me dirais pas que c’est pour cette raison. C’est un privilège.” [11]
Ensuite, certains refusent d’accepter ce concept en raison des différences historiques entre les Etats-Unis et les pays européens. Force est néanmoins de reconnaître que le privilège blanc est bel et bien une conséquence des inégalités raciales, et ce peu importe le lieu. Tel que la sociologue française Claire Cosquer l’exprime, “l’existence d’inégalités suppose donc, en toute logique, l’existence de privilèges. Dès lors, dire que le « privilège blanc » n’existe pas en France revient de façon rigoureusement identique à affirmer que le racisme n’existe pas en France”. [10] (Ce même constat peut être appliqué en Belgique).
Sources
[1] Le Robert, dictionnaire en ligne , consulté le 10 juillet 2021, disponible sur www.lerobert.com,
[2] M.Cervulle “la conscience de domination.Rapports sociaux, race et subjectivation”, Cahier du genre, 2012/2, n°53, pp.38-39.
[3] A. Pierre, “ Ligue des droits et libertés, “Mots choisis pour réfléchir au racisme et à l’antiracisme ”, Revue des droits et libertés, automne 2016, disponible sur www.liguedesdroits.ca
[4] L. Quiroz, “Le “privilège blanc” : une notion contre-productive pour combattre le racisme ?”, disponible sur https://www.gaucheanticapitaliste.org, publié le 21 novembre 2017.
[5]V. Laroche-Signorile, “Ségrégation et discrimination aux Etats-Unis dans les années 60”, disponible sur https://www.lefigaro.fr, publié le 20 février 2015.
[6] U. N'Gbatongo, “Les mouvements afro-américains des droits civiques des années 1960”, disponible sur https://les-yeux-du-monde.fr, publié le 27 mai 2018.
[7]W. Ray, “ “Privilège blanc” : ce qui se cache derrière le slogan”, disponible sur https://www.lepoint.fr, publié le 30 septembre 2018.
[8]N. Lisa Cole, “Understanding and defining White privilege”, disponible sur https://www.thoughtco.com, publié le 22 juin 2020.
[9] C. Simon, “Antiracisme : quatre questions à se poser sur le concept de “privilège blanc””, disponible sur https://www.leparisien.fr, publié le 10 juin 2020.
[10] C. Cosquer, “ L’expression de “privilège blanc” n’est pas dénuée de toute pertinence pour penser le contexte français”, disponible sur www.lemonde.fr, publié le 16 juin 2020.
[11] O. Diallo, “ Eric Fassin : “Les racisés ne sont pas définis par leur couleur, mais par leur expérience du racisme”, disponible sur https://information.tv5monde.com, publié le 28 avril 2020.